La mairie de Hiré
Imaginez la planète Mars, en plein milieu d’un paysage inerte et totalement recouvert d’une poudre couleur ocre. Rien ne semble bouger, tout est au ralenti. Une nature morte. Imaginez cela et vous verrez que vous êtes à Hiré, une localité du département de Divo. Vous êtes, tout de suite, frappé par la violence d’un immense nuage de poussière qui engloutit la ville. Tout Hiré vit sous une épaisse couche de poussière. Le bitume qui vient de Divo, s’arrête à une quinzaine de kilomètres. La grande voie qui traverse la cité en allant d’Oumé à Divo et celle qui mène au quartier baoulé, sont les principales de la ville. Elles sont un véritable enfer. Ce sont les seules véritablement carrossables, mais les véhicules et les innombrables motos qui y circulent, soulèvent la poussière en permanence et rendent l’air irrespirable. « Comme vous pouvez le constater en voyant les murs des maisons, la poussière n’est pas due à l'harmattan. C’est comme ça toute l’année », informe le moto-taximan qui nous transporte. Comme il n’y a pas d’emploi pour la jeunesse locale, seules les taxis-motos leur permettent de survivre. C’est un mal nécessaire.
La voie principale de Hiré
Ainsi va la vie à Hiré, une ville qui est pourtant riche de trois grandes mines d’or. Elles sont exploitées par Africa Gold. Les trois sites sont situés dans le village d’Agbahou, dans la ville de Hiré et à Bonikro. Selon le député Dago Auguste, l’entreprise n’a pas d’obligation particulière vis-à-vis de la région. Elle paie les taxes de l’Etat et verse 0,05 % de son chiffre d’Affaire au Comité de développement local des entreprises minières (CDLEM) qui fonctionne depuis 2015. Ce comité est présidé par le préfet du département de Divo et a pour vice-président, le président du Conseil régional. Il est chargé de réaliser des projets de développement dans les sites impactés. Ainsi, un château d’eau est en construction à Hiré, le collège moderne s'agrandit de quelques bâtiments supplémentaires et le centre de santé est en train d’être transformé pour devenir un hôpital moderne.
L'or est exploité en pleine ville
Africa-Gold annonce fièrement qu’elle affecte chaque année, des investissements de l’ordre de 10 milliards dans les œuvres sociales, depuis 2008 qu’elle est là. Mais le député n’est pas du tout satisfait. « On ne peut pas être content quand on a trois mines d’or dans une ville qui se trouve dans cet état. Nous devrions avoir des infrastructures qui dénotent de la présence de ces trois mines. Le niveau de développement de Hiré devrait correspondre à sa production d’or. Il n’y a même pas de bitume. On nous promet un goudron qui va traverser la ville, avec 15 km à l’intérieur », déclare-t-il.
Dans la ville de Hiré même, il y a 5 « pits » dont trois sont pleinement en exploitation. Le quartier Akississo a été entièrement déplacé. Et le cimetière Baoulé le sera également. « En février 2022, ils recevront leur dédommagement pour aller chercher un autre cimetière », promet un employé. Koffi Koffi, fils de la région, est chef d’entreprise en Europe. Il est en vacances à Hiré et ne décolère pas. « Quand ils provoquent des explosions pour rechercher l’or, c’est terrible ! Les placards s’ouvrent, les miroirs se brisent et tout tremble. Mais il n’y a aucun bénéfice. Pas de voie de circulation, tout est poussiéreux et sale. C’est une malédiction ».
La ville est entourée de montagnes pleines d'or
Dans une villa située au quartier Assahê 1, l’entreprise a installé un Espace communautaire (ESCO). Il s’agit d’un bureau destiné à enregistrer les préoccupations des populations. Et les réclamations sont nombreuses. Ce mardi 4 janvier 2022, Brou Kouadio Jules vient se plaindre. « J’ai un Ha de terrain où j’ai planté de l’anacarde et du teck. La plantation a été détruite et je n’ai été payé que pour l’anacarde. Je veux qu’on me paye pour le teck. Pour le paiement, ils ne tiennent pas compte de la surface mais seulement du nombre d'arbres qu’ils comptent l’un après l’autre ».
L’extraction de l’or a déjà touché la ville. Comme de nombreux terrains lotis et même bâtis, l’école primaire EPP Hiré-Stade ne sera pas épargnée. La ville elle-même est en sursis. Tout comme plusieurs villages.
Paul D. Tayoro
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