LES ENFANTS ONT-ILS RAISON D'AVOIR TORT?
Je suis allé rendre visite un jour à un collègue qui tenait une classe de 6eme. L'effectif avoisinait 100 élèves. La classe était animée d'un bruit pas possible. Alors je demandai à mon collègue s'il parvenait à faire son cours avec une classe aussi bruyante et pléthorique. Bien évidemment il me disait que non. Il était prof de math tout comme moi.
Dans cet environnement comment un élève pourrait assimiler facilement les propriétés sur les droites,comment pourrait-il s'appliquer sur les constructions géométriques, comment pourrait-il maîtriser les calculs algébriques ? Dans ces conditions là il fallait avoir un autre enseignant en dehors de l'école pour être sûr d'avoir compris le cours. L'élève évoluera dans ces conditions jusqu'en 3ème avec toutes ces lacunes accumulées et il passera le BEPC.
J'entends certaines personnes dire que les sujets de maths sont de plus en plus faciles. Mais comment voulez vous que ça soit autrement ? Comment pouvons nous évaluer aussi durement des élèves qui ont appris dans des conditions qui laissent à désirer?
Comment pouvons nous évaluer des élèves qui n'ont pas eu de professeur de math en 6eme, en 5eme Un fait m'a aussi marqué, c'était la qualité des bancs.
On se croyait au primaire de tout petits bancs serrés où les élèves s'y asseyaient à 3 voir 4. Ils devaient être comme ça sur ces bancs de 7h à 12h avec une pause de 15 min et d'autres le soir de 13h à 17h dans des conditions de température que nous savons tous. Ces condtions ne justifient-ils pas le bavardage,la distraction, la démotivation observés dans ce type de classe ?
Et certaines personnes nous parlent de PPO. Appliquer le système PPO dans ces conditions seraient une catastrophe. Parce que avec L'APC on arrive à susciter l'intérêt de beaucoup d'élèves. Je donne un exemple. Je veux faire le cours sur la proportionnalité.
Et d'emblée je donne une situation aux élèves où le but recherché est qu'ils trouvent la solution sans propriété, sans règle, sans définition ayant recours formel aux mathématiques. L'enfant trouvera la solution mais avec une méthode très longue et le prof dira aux élèves que le but de cette nouvelle leçon est d'apprendre des propriétés mathématiques pour résoudre plus facilement ce genre de situation de la vie courante. Avec cette approche, l'élève a plus de chance d'assimiler le savoir puisque la notion étudiée se retrouve dans son environnement, avec cette approche même si on a 100 élèves on peut arriver à attirer l'attention de la majorité, en les mettant en petits groupes pour qu'ils interagissent entre eux. Je ne dis pas non plus qu'on est 100% à l'aise avec cette méthode, parce qu'elle serait mieux enseignée si l'effectif n'était pas aussi pléthorique et si des manuels adaptés étaient mis à la disposition des enseignants.
Parlons maintenant de l'État de notre société qui dépeint sur l'école et donc sur le rendement scolaire et le comportement des élèves. Le gouvernement nous a démontrés qu'il n'y a pas d'équité dans son système éducatif.
En effet, pendant la grève de 2019, des lycées comme celui de Bocanda avaient fermé leurs salles de classe pendant trois mois, mais ce fait grave ne semblait nullement inquiéter notre ministre de tutelle qui continuait à ignorer les revendications des enseignants. Pendant ce temps, les médias du gouvernement se rendaient dans quelques rares établissements d'Abidjan pour montrer qu'il y avait cours.
Aux résultats du BAC, où les sujets n'avaient pas tenu compte de la progression des élèves de Bocanda, la série C avait obtenu 100% au lycée Ste Marie tandis qu'on avait eu 0% au lycée de Bocanda. L'élève de Bocanda n'a donc pas les mêmes droits à l'éducation que celui d'Abidjan.
Pendant la crise de COVID 19, des cours à la télé avaient été initiés par la tutelle. Et pourtant dans le pays profond certains élèves n'avaient même pas accès à la radio.
Nos élèves n'ont-ils pas raison d'avoir tort ? Cette propension de la violence n'est-elle pas le désir de s'exprimer, de faire ressortir toute cette frustration longtemps dissimulée ? Nos élèves ne sont-ils pas le reflet de la société, notre société, de ces adultes, qui pourtant, chargés de leur donner une bonne éducation ? Cette société entachée, salie, souillée par la quête égoïste d'intérêt personnel de certains hommes, par l'enrichissement illicite, la corruption, le buzz... Cette société où il n'y a plus de pudeur où l'on fait de la médiocrité un challenge. Et le vrai talent,l'intelligence, le respect de la légalité, de nos lois fondamentales sont rangés au placards ?
Les enfants n'ont-ils donc pas raison de nous faire du tort?
Nous les utilisons à nos souhaits, non pas pour apporter leur pièce au développement de la société mais à contribuer à son recul Ils agressent pour les adultes, ils tuent pour les adultes, ils volent pour les adultes, ils vendent de la drogue pour les adultes, ils achètent de la drogue, de l'alcool avec des adultes, ils font la guerre pour les adultes, ils sont exploités par des adultes pour leur commerce sur des routes, des ponts, traités comme des esclaves dans leur maison. Oui, les enfants ont raison de nous faire du tort. Et qu'est-ce que vous faites pour les enseignants, ces personnes formées pour enseigner, redresser,éduquer ces futurs adultes ? Les enseignants sont à la tâche pour former les adultes qui iront redresser cette societe gravement perverties.
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