Wonipo Karrieri est un apprenti-gbaka que j'ai rencontré un jour qu'il était en activité et que j'étais dans son gbaka, en partance pour Adjamé. Il m'a demandé si c'était moi LCB, j'ai dit oui, et il a rétorqué qu'il me lisait sur les réseaux sociaux parce qu'étant une furie de lecture. Nous avons sympathisé et gardé le contact, devenus deux bons amis. Je me suis intéressé à la vie de cet apprenti qui a arrêté les cours au lycée. La première question que j'ai posée au jeune homme est celle-là :

- Qu'est-ce qui t'a le plus marqué depuis que tu fais ce métier ?

Il a un peu réfléchi pour se souvenir d'une anecdote qu'il nous relate :

- Un jour, au niveau du Terminus 40, une femme avait un billet de 10.000 francs et peinait à se faire accepter dans les gbakas. Tout le monde lui refusait l'accès. Quand mon gbaka est passé près d'elle, elle m'a dit qu'elle n'a pas de monnaie. Je lui ai dit de monter quand même. Puis elle m'a montré le gros billet de 10.000 en croyant que j'allais finir par me rétracter. Je lui ai dit, pas de quoi, et elle était toute surprise. Quand nous sommes arrivés au niveau de la gare nord d'Adjamé, elle est descendue en me tendant le billet de 10.000 francs pour que je puisse y retirer mon transport qui était de 300 francs. Je lui ai dit "madame je ne vous ai pas acceptée pour vous encaisser. Je vous ai prise gratuitement.''

La femme était tellement stupéfaite qu'elle m'a hélé alors que mon gbaka était en train de partir. Mon chauffeur a serré. Je suis allé vers elle. Elle m'a affirmé qu'elle ne s'est jamais imaginée qu'un apprenti-gbaka pouvait être autant aimable avec elle. Elle m'a dit merci, a sorti 30.000 francs de son sac, qu'elle m'a remis en me disant de donner 10.000 francs à mon chauffeur et de prendre 20.000 francs pour moi-même. Elle m'a béni en m'encourageant à rester poli et serviable envers les autres. Ce souvenir m'a profondément marqué, et c'est ce que je retiens de plus beau depuis que je suis apprenti-gbaka. Je ne me fâche jamais quand quelqu'un n'a pas de monnaie, je suis respectueux envers tous mes passagers, car dans la vie, on ne sait jamais.

Louis-César BANCÉ

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